Partir vivre aux Emirats Arabes Unis : échapper à la fiscalité française n’est pas si facile !

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A l’heure des confinements à répétition et des couvre-feux en série, nombreux sont ceux qui rêvent d’ailleurs, de soleil et de simplicité. A cet égard, les Emirats Arabes Unis, et en particulier Dubaï, apparaissent pour beaucoup d’entrepreneurs comme un eldorado où tout devient possible et où, en prime, il n’y a aucun impôt à payer !

Des influenceurs comme Nabilla, Thomas Vergara et Caroline Receveur ont déjà sauté le pas, suivis par des investisseurs en cryptomonnaie et par des dirigeants de groupe qui rêvent d’internationaliser leur activité et de diriger leur société depuis la plage ou les salons cosy de Burj Khalifa.

Tous ces nouveaux expatriés doivent faire attention à la fiscalité française qui pourrait les poursuivre après leur départ : non seulement ils peuvent être redevables d’une « exit tax » à leur sortie de France mais la convention fiscale conclue avec les Emirats contient une clause spécifique qui pourrait les rendre redevables de leurs impôts en France comme s’ils n’étaient jamais partis !

L’exit tax : la taxe à la frontière

L’exit tax est un dispositif fiscal qui empêche les contribuables français de s’expatrier pour céder leur entreprise depuis des Etats où il y a peu ou pas de fiscalité (Dubaï, Belgique, etc.).

En effet, un résident fiscal français qui passe la frontière doit déclarer ses plus-values latentes à raison des titres de société qu’il détient comme s’il cédait ses titres la veille de son déménagement. Le champ d’application du dispositif est assez large car il concerne les contribuables qui détiennent plus de 800.000€ de titres (en valeur) ou au moins 50% du capital d’une société. Ainsi, même une petite entreprise est concernée par l’exit tax dès lors que le dirigeant en détient le contrôle.

Heureusement pour ces nouveaux expatriés, l’impôt dû à raison de cette plus-value « fictive » peut bénéficier d’un « sursis de paiement » jusqu’à la date de cession réelle des titres, sous réserve de respecter certaines obligations déclaratives assez lourdes (déclaration de plus-value à souscrire avant le départ, désignation d’un représentant fiscal et constitution de garanties destinées à assurer le futur paiement de l’impôt…). En cas de non-respect de ces conditions, l’impôt deviendra immédiatement exigible bien que les titres n’aient pas encore été cédés !

Ce sursis de paiement expirera lors de la cession réelle des titres par le contribuable expatrié. Celui-ci pourra alors théoriquement imputer sur l’impôt français l’impôt émirati acquitté à raison de sa plus-value mais dans la mesure où il n’y a pas d’impôt aux Emirats Arabes Unis, l’intégralité de l’impôt français bénéficiant d’un sursis de paiement sera dû à la France.

Précisons néanmoins que pour les expatriés concernés par le dispositif d’exit tax, un dégrèvement de l’impôt mis en sursis de paiement est possible après deux ou cinq années de résidence émiratie selon la valeur des titres détenus. Mais pour certains d’entre eux, ce dégrèvement devrait avoir une portée limitée dans la mesure où la convention conclue entre la France et les Emirats contient une clause de « participation substantielle » qui donne à la France le droit d’imposer les plus-values réalisées par un résident émirati qui détient plus de 25% du capital d’une société française. Même sans exit tax, un résident fiscal émirati restera donc souvent redevable d’une imposition française à raison de sa plus-value.

L’article 19.2, où le résident fiscal français qui se croyait émirati

Les critères contenus dans la convention conclue entre la France et les Emirats Arabes Unis pour trancher les conflits de résidence fiscale sont très classiques : foyer d’habitation permanent, centre des intérêts vitaux, lieu de séjour habituel, nationalité et, à défaut, accord entre les Etats. En cas d’expatriation, il est donc assez aisé de s’assurer d’une résidence fiscale émiratie en prenant quelques précautions élémentaires. En particulier, on relèvera que l’expatrié qui ne conserve aucun logement à sa disposition en France aura son « foyer d’habitation permanent » aux émirats et sera donc résident fiscal émirati sans contestation possible pour l’application de la convention.

C’est sans compter sur une clause spécifique contenue à l’article 19.2 de la convention et selon laquelle un résident émirati qui remplit les critères de résidence fiscale au sens de la loi française (et non de la convention) est imposable en France comme si la convention n’existait pas (à moins qu’il soit citoyen des EAU).

Il est donc primordial pour ces expatriés de ne remplir aucun des critères de résidence fiscale française listés à l’article 4 B du Code général des impôts : foyer, activité professionnelle ou centre des intérêts économiques. A défaut, la France pourrait considérer que ces expatriés doivent être imposés comme des résidents fiscaux français bien que la convention les considère comme résidents émiratis…

Or, les critères de résidence fiscale française étant très larges, le risque de remplir au moins l’un d’entre eux peut être très important selon les circonstances : sans lister tous les cas de figure possibles, on peut citer comme facteurs de risques le fait qu’un membre du foyer fiscal reste en France, qu’un dirigeant continue d’exercer des mandats sociaux au sein d’entreprises françaises ou que les revenus de ces nouveaux expatriés soient majoritairement de source française…

La situation de chaque expatriation doit donc être analysée avec beaucoup de vigilance car, en cas de redressement, l’expatrié devra s’acquitter de son imposition, de l’intérêt de retard (0,2% par mois de retard) et de pénalités d’au moins 10%. Et cela sur un minimum de trois années.

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